Comment Fidelity a saisi une occasion lors du confinement pour accélérer sa croissance

Comment Fidelity a saisi une occasion lors du confinement pour accélérer sa croissance

Autrice :  Clare O’Hara

Source :  The Globe And Mail

 

Au cours des 20 dernières années, le président de Fidelity Investments Canada s.r.i., Rob Strickland, a tranquillement bâti l’une des plus importantes sociétés de gestion de fonds communs de placement indépendantes du pays.

Pour une société de fonds d’investissement sans vaste réseau interne de conseillers et conseillères, distribuer 180 fonds à plus de deux millions de personnes au pays n’a pas été une mince affaire.

M. Strickland et ses 69 équipes de distributeurs ont dû établir des relations avec les conseillers et conseillères travaillant chez certains des plus grands concurrents de Fidelity, comme les plus importantes banques du Canada et les filiales de gestion de patrimoine de géants de placement indépendants, dont CI Financial Corp. et la Société financière IGM.

Au cours des 15 premières années du mandat de M. Strickland, la part de marché de la société a progressé graduellement. Puis, en 2020, la pandémie a contraint la société à se tourner rapidement vers le télétravail et aux appels vidéo pour tenter de maintenir les relations existantes avec ses conseillers et conseillères.

En même temps, les organismes de réglementation ont instauré des règles plus strictes concernant la connaissance des produits et les conflits d’intérêts.

C’était l’occasion idéale pour Fidelity.

Alors que les semaines passaient, M. Strickland a constaté que la webémission hebdomadaire qu’il avait lancée un an plus tôt attirait désormais des milliers de conseillers et conseillères en placements avides de mises à jour économiques, de conseils réglementaires et de protocoles de retour au bureau. La webémission s’est immédiatement transformée en diffusion quotidienne.

« Avant la pandémie, on pouvait peut-être attirer 1 000 personnes pour une réunion en ligne d’une demi-heure un lundi », a déclaré M. Strickland lors d’une récente entrevue dans son bureau de Toronto. « Mais maintenant, 5 000 conseillers et conseillères se connectent pour écouter certains de nos gestionnaires de portefeuille les plus connus. »

Tout comme Abby Johnson, chef de la direction de Fidelity ULC aux États-Unis, M. Strickland préfère rester discret, laissant les commentaires publics et les projecteurs à ses gestionnaires de portefeuille.

Il accorde rarement des entrevues aux médias pour discuter de la stratégie de la société. Pourtant, il s’anime lorsqu’il raconte que le virage que la société a entrepris pendant la pandémie a en fait commencé sans le savoir au cours d’un voyage dans la Silicon Valley en 2018. C’est là qu’il a découvert Blue Jeans Network, une société de vidéoconférence qui allait transformer entièrement le plan d’affaires de Fidelity. Le partenariat conclu cette année-là a permis à Fidelity de se détourner des conférences téléphoniques coûteuses et d’élargir la portée de ses gestionnaires de portefeuille au moyen de vidéoconférences. (Blue Jeans a été acquis en 2024 et les webémissions ont maintenant lieu sur Zoom.)

« Cela a été une révolution pour moi », a déclaré M. Strickland. « Nous avons normalisé l’accès aux gestionnaires de portefeuille non seulement pour les conseillers et conseillères, mais aussi pour les investisseurs individuels qui veulent obtenir de l’information de première main. »

Bien que les appels de type Zoom sont monnaie courante aujourd’hui, l’utilisation de la technologie par Fidelity va bien au-delà des réunions internes du personnel. La société diffuse quotidiennement une webémission sur des sujets liés au secteur, à la réglementation et à l’actualité.

Parmi les invités, mentionnons des représentants d’organismes de réglementation des placements, des politiciens, des économistes et des fiscalistes de renom, ainsi que des gestionnaires de portefeuille populaires de la société.

« Je pense que nous avons mieux tiré notre épingle du jeu dans ce contexte », a mentionné M. Strickland.

Depuis, les ventes de Fidelity ont explosé.

Aujourd’hui, les Canadiens et Canadiennes détiennent environ 2 290 milliards de dollars en actifs de fonds communs de placement, selon les données fournies par l’Association des marchés de valeurs et des investissements (AMVI). Lorsque M. Strickland est entré en fonction au début de 2005, l’entreprise était le septième plus grand gestionnaire de fonds au Canada.

En mars 2020, Fidelity gérait un actif de 116 milliards de dollars. À la fin de l’année, l’actif de Fidelity s’élevait à plus de 171 milliards de dollars, ce qui lui conférait une part de marché de 8,2 % du secteur des fonds communs de placement au Canada.

En juillet 2023, Fidelity affirme avoir dépassé la Banque Toronto-Dominion pour devenir le deuxième plus important gestionnaire de fonds communs de placement au Canada, avec 10,8 % de la part de marché des fonds communs de placement, juste derrière la Banque Royale du Canada. Aujourd’hui, la société gère plus de 307 milliards de dollars d’actifs.

Contrairement à bon nombre de ses concurrents qui sont des sociétés cotées en bourse, Fidelity est une coentreprise privée du géant américain Fidelity ULC et de Fidelity Ltd.

La société a été lancée au Canada le 19 octobre 1987, un jour mieux connu sous le nom de « lundi noir », lorsque l’indice boursier Dow Jones a chuté de près de 23 %.

Ce fut une date de lancement malheureuse, mais aussi un moment opportun pour proposer des produits de fonds communs de placement à des sélectionneurs de titres mécontents. L’un d’eux était M. Strickland, qui était un jeune courtier de 24 ans travaillant pour Nesbitt Burns, une société de placements à service complet établie à Toronto qui sera acquise par la suite par la Banque de Montréal.

« Honnêtement, j’ai cessé d’être d’un négociateur à la bourse ce jour-là », dit-il. Il a commencé à vendre des fonds Fidelity à sa clientèle et a bâti sa carrière autour du produit.

En 1994, il s’est joint à TD Evergreen, l’entreprise de courtage de la Banque Toronto-Dominion. Quatre ans plus tard, il a été nommé président de TD Evergreen, où il a travaillé avant de se joindre à Fidelity en 2003 à titre de directeur national des ventes.

À la fin des années 1980, les ventes de fonds communs de placement étaient en plein essor chez les gestionnaires d’actifs indépendants. Les banques canadiennes ont tardé à profiter de la croissance rapide, mais au début des années 1990, les six grandes banques avaient toutes lancé des divisions de gestion d’actifs avec leurs propres familles de fonds communs de placement.

En 2008, les sociétés de fonds indépendantes dominaient toujours le marché avec 57 % de l’actif net dans le secteur des fonds, tandis que les banques et les coopératives de crédit représentaient 31 %, selon une étude menée par Strategic Insight. (Les assureurs et les autres vendeurs tiers représentent les 12 % restants.)

En 2021, la part de marché des sociétés indépendantes avait chuté à seulement 36,1 %, alors que les banques et les coopératives de crédit affichaient une croissance de 53,8 % des actifs des fonds communs de placement, selon l’AMVI.

Aujourd’hui, les sociétés de fonds indépendantes ont repris un peu de terrain, gérant 38,1 % du marché.

Selon M. Strickland, le monde numérique a été le facteur déterminant pour la société, lui permettant de communiquer de manière significative avec plus de conseillers et conseillères en placements. Avant la pandémie, la société organisait un événement au Roy Thompson Hall à Toronto pour 1 000 personnes afin que ses gestionnaires de portefeuille puissent parler du marché et des produits. La première conférence hybride d’une journée de la société comptait près de 6 000 participants.

Bien que la croissance de Fidelity Canada repose encore largement sur les fonds communs de placement, elle gère également environ 18 milliards de dollars de fonds négociés en bourse. Il s’agit d’une part du secteur auquel Fidelity n’a adhéré qu’en 2017, ce que M. Strickland admet être beaucoup plus tard que ses pairs.

« Mais nous ne nous précipitons jamais », dit-il. « Nous préférons prendre du recul et faire preuve de prudence. »

La société a adopté une approche semblable avec Patrimoine Fidelity, une nouvelle société de services-conseils qui a reçu l’approbation réglementaire l’an dernier. Elle n’a pas l’intention d’acquérir une société de services-conseils existante ni de recruter massivement des conseillères et des conseillers individuels. Fidelity vise plutôt à embaucher progressivement un groupe de planificateurs et planificatrices qui peuvent prendre en charge les affaires des 16 000 conseillers et conseillères au pays qui devraient prendre leur retraite au cours de la prochaine décennie.

« Nous avons appris à toute une génération de conseillers et conseillères à aimer notre gamme de produits et maintenant ils prennent leur retraite », ajoute-t-il. « Nous devons donc nous assurer qu’il y a une relève capable de servir ces clients. » 

 

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