Rédigé par : Jason Heath, CFP

Source : MoneySense

 

Fareed Ahamed, conseiller en placement de Vancouver, a ouvert un compte d’épargne libre d’impôt (CELI) en 2009, tout juste après le lancement du programme par le gouvernement fédéral. À la fin de 2011, ses cotisations de 15 000 $ étaient passées à plus de 600 000 $. Il négociait des actions spéculatives cotées en cents, principalement dans le secteur des petites sociétés minières, et les conservait pendant des périodes relativement courtes.

L’Agence du revenu du Canada (ARC) a jugé que les activités de négociation de M. Ahamed constituaient des opérations commerciales de 2009 à 2013 et que les profits, même s’ils étaient détenus dans un CELI, étaient en fait imposables. Dans une récente décision de la Cour canadienne de l’impôt, le juge David E. Spiro a validé l’interprétation de l’ARC, le contribuable ayant toutefois fait appel de la décision.

Que constitue la spéculation sur séance dans un CELI, selon l’ARC?

L’ARC a déjà soutenu que les opérations sur valeurs peuvent ne pas toujours être au titre de capital et que leur produit peut être considéré comme un revenu si elle juge que le contribuable exploite une entreprise. 

L’ARC énumère « certains facteurs dont il faut tenir compte pour déterminer si, dans le cours normal de ses affaires, le contribuable exploite une entreprise :

  • répétitions de transactions semblables – un historique d’achats et de ventes intensifs de valeurs mobilières ou de ventes rapides de biens;
  • période de détention – les titres sont habituellement détenus pour une courte période;
  • connaissance des marchés des valeurs mobilières – le contribuable a des connaissances ou de l’expérience de ces marchés;
  • les transactions de valeurs mobilières font partie des activités habituelles du contribuable;
  • temps consacré – le contribuable consacre une partie importante de son temps à l’étude du marché des valeurs mobilières et à la recherche d’achats éventuels;
  • financement – les valeurs mobilières sont principalement achetées sur marge ou financées par un autre genre de dette;
  • publicité – le contribuable a annoncé ou a fait savoir autrement qu’il était prêt à acheter des valeurs mobilières; et
  • dans le cas d’actions, leur nature – elles sont habituellement de nature spéculative ou ne produisent pas de dividendes. »

Il convient de mentionner qu’aucun des facteurs ne suffit, en lui-même, à déterminer si les opérations d’un contribuable sont celles d’une entreprise, mais qu’il faut plutôt tenir compte de la combinaison de plusieurs facteurs. 

Revenu tiré des spéculations sur séance dans un compte non enregistré

Si l’ARC détermine que les opérations d’un contribuable dans son compte non enregistré constituent l’exploitation d’une entreprise, les profits seront entièrement imposables à titre de revenu d’entreprise, plutôt qu’à titre de gain en capital dont seulement 50 % sont imposables. Par conséquent, l’impôt à payer doublera, sinon plus, si l’inclusion de ce revenu additionnel pousse le contribuable dans une fourchette d’imposition supérieure.

Ce traitement fiscal peut s’appliquer aux monnaies, notamment les cryptomonnaies. Il peut également s’appliquer aux vendeurs à découvert qui vendent une action à découvert, ainsi qu’au bénéfice découlant du rachat de l’action à un prix moindre. 

Certaines activités de négociation d’un contribuable peuvent être considérées en tant que revenu (traitement à titre de revenu d’entreprise) et d’autres, à titre de capital (traitement au titre de l’impôt sur les gains en capital), notamment si le contribuable est titulaire d’un compte qui est activement négocié et d’un autre qui l’est moins.

Revenu tiré des spéculations sur séance dans un compte d’épargne libre d’impôt

Même si elle fait l’objet d’un appel, la décision rendue dans l’affaire Ahamed constitue une mise en garde pour les autres investisseurs qui effectuent des spéculations sur séance ou exercent d’autres activités spéculatives dans un CELI. 

Ces investisseurs risquent de voir leurs revenus et bénéfices normalement libres d’impôt devenir entièrement imposables à titre de revenu d’entreprise, et de payer des intérêts et des pénalités si ces revenus sont ajoutés, plus tard, à la déclaration de revenus d’une année antérieure.

Autres comptes de retraite enregistrés

Les régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER), les fonds enregistrés de revenu de retraite (FERR) et les comptes de retraite enregistrés assimilables sont exonérés de l’impôt sur le revenu d’entreprise tiré de la négociation de valeurs mobilières. 

Selon l’ARC, « si un REER ou un FERR s’adonnait à des activités commerciales consistant à spéculer sur des valeurs mobilières, le régime ne serait pas imposable sur le revenu qu’il en tire à condition que les activités se limitent à l’achat et vente de placements admissibles. »

Les placements admissibles comprennent les liquidités, les obligations, les certificats de placement garanti (CPG), les actions, les fonds communs de placement, les fonds négociés en bourse, les bons de souscription et les options, les devises, l’or et l’argent, ainsi que d’autres titres et fonds de placement cotés en bourse. 

Cette exonération liée aux spéculations sur séance pour les REER peut sembler une bonne nouvelle de prime abord. Toutefois, elle pourrait devenir moins bonne si vous réfléchissez aux raisons pour lesquelles l’ARC consent cette exonération. 

Étant donné que les comptes REER sont finalement assujettis aux exigences de retrait minimal d’un FERR à compter de l’âge de 72 ans au plus tard et qu’ils sont entièrement imposables au décès (à moins d’être laissés à un bénéficiaire admissible, comme le conjoint ou un enfant ou petit-enfant mineur financièrement à charge), l’ARC finira par toucher son impôt. Si vous réussissez à faire fructifier votre compte REER ou FERR par spéculation sur séance, l’impôt à payer sera plus élevé à l’avenir, puisque les retraits sont entièrement imposables. 

Il semble que la nature non imposable des CELI et le traitement fiscal préférentiel des gains en capital (imposables seulement à hauteur de 50 %) exposent les CELI et les comptes non enregistrés à un risque.

Négociation dans un REEE

Les régimes enregistrés d’épargne-études (REEE) sont des comptes enregistrés, qui peuvent présenter un risque particulier s’il est établi qu’un investisseur exploite une entreprise. Selon l’ARC, « l’alinéa 146.1(2.1)c) [de la Loi de l’impôt sur le revenu] prévoit qu’un REEE est révocable s’il commence à exploiter une entreprise ».

Les subventions gouvernementales pourraient alors devenir remboursables et le revenu accumulé imposable, et l’ARC pourrait appliquer une pénalité de 20 %.

Les négociateurs devraient-ils se constituer en société par actions?

L’ARC a confirmé qu’une activité de négociation peut être considérée comme une « entreprise exploitée activement » et que tout gain ou perte, ainsi que tout revenu d’intérêts ou de dividendes, peut donner droit à la déduction accordée aux petites entreprises. L’un des avantages de la constitution en société par actions est qu’un spéculateur sur séance peut profiter du faible taux d’imposition sur le revenu tiré d’une petite entreprise.

Ce taux varie actuellement de 9 % à 12,2 %, selon la province ou le territoire, ce qui est bien inférieur au taux d’imposition le plus bas des particuliers.

Devriez-vous effectuer des opérations sur vos comptes de placement?

Chaque année, les institutions financières déclarent les cotisations à un CELI et le solde du compte à l’ARC. Il est donc facile de repérer les soldes élevés des CELI et les gains importants réalisés dans ceux-ci. L’ARC vérifie les déclarations des contribuables qui ont peut-être effectué des spéculations sur séance dans leur CELI et elle continuera de le faire.

Les contribuables doivent être conscients des conséquences fiscales des opérations de spéculation sur séance et de leur impact éventuel sur les différents comptes. Les investisseurs doivent tenir compte des risques associés aux opérations de spéculation sur séance.

 

Cet article a été rédigé par Jason Heath, CFP de MoneySense et sa publication a été autorisée légalement par Content Marketplace d’Industry Dive. Pour toute question sur les droits de reproduction, veuillez écrire à legal@industrydive.com.