
Les approches de l’investissement durable
La définition de l’investissement durable varie d’une personne à l’autre. Pour certaines, l’important est d’éviter certaines activités ou certains secteurs. Pour d’autres il s’agit d’adopter une approche plus proactive, c’est-à-dire : avoir un impact positif plutôt que de se contenter de « ne pas faire de mal », mais être un vecteur de changement.
Concrètement, les différentes approches de l’investissement durable se répartissent sur un axe allant de la stratégie de placement conventionnelle aux programmes philanthropiques.
À une extrémité de l’axe, il y a les stratégies traditionnelles qui se concentrent généralement sur les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) des placements sous-jacents, car elles cherchent principalement à générer des rendements concurrentiels.
À l’autre extrémité de l’axe, il y a la philanthropie. Dans un contexte d’investissement, les philanthropes sont ceux qui accordent peu ou pas d’importance aux rendements concurrentiels, car ils cherchent principalement à avoir un impact positif et à résoudre un ou plusieurs problèmes environnementaux et sociaux.
Il n’y a pas de solution universelle en matière d’investissement durable, mais ces stratégies utilisent habituellement un ou plusieurs des éléments suivants :
1. Filtre
L’application de filtres est un processus permettant de déterminer l’admissibilité d’un placement dans le portefeuille. D’une manière générale, on applique des règles pour déterminer si un placement est autorisé. Il existe différentes façons de procéder à cette pré-sélection.
Filtrage négatif ou d’exclusion
Il s’agit du filtrage traditionnel qui vise à cerner les placements dits « éthiques ». Il s’agit d’éviter ou d’exclure certains types de titres ou de sociétés en fonction d’activités, pratiques commerciales ou segments d’affaires ESG qui peuvent être considérés comme controversés, comme la fabrication et la négociation d’armes, les ventes de tabac, le divertissement pour adultes et l’extraction de combustibles fossiles. Le contenu de cette liste dépend des valeurs personnelles de l’investisseur.
La gestion du risque peut également faire partie de l’équation. Par exemple, dans le secteur du pétrole et du gaz, l’évolution des valeurs ou les changements réglementaires peuvent signifier plusieurs choses : on pourrait penser que le secteur affiche une tendance descendante à long terme, que le coût du capital augmentera au fil du temps et/ou que nombre des réserves des sociétés énergétiques pourraient ne jamais être exploitées. Ce sont là des risques financiers tangibles qu’une approche d’exclusion est susceptible d’écarter. Mais en fin de compte, l’exclusion est bien souvent une question de conscience.
Filtrage positif ou sélection de chefs de file
C’est le contraire du filtrage d’exclusion. La sélection de chef de file consiste à rechercher des sociétés qui font mieux que leurs pairs selon plusieurs mesures de rendement liées aux facteurs ESG. Une cote ESG favorable peut être assimilée à une marque de qualité. Les entreprises qui reconnaissent les forces à l’œuvre dans leur environnement et qui s’adaptent en conséquence sont généralement perçues comme étant supérieures aux autres. Par conséquent, les marchés récompensent ces sociétés par le biais de valorisations plus élevées et d’un accès à plus faible coût au capital.
Filtrage fondé sur des normes
Il s’agit d’appliquer des règles fondées sur la conformité aux normes ESG largement reconnues, comme celles du Pacte mondial des Nations Unies ou de l’Organisation internationale du travail, entre autres. La non-conformité entraînerait le rejet d’un placement, et le contraire ferait en sorte que le placement serait autorisé dans le portefeuille.
2. Intégration des principes ESG
Lorsque les spécialistes en placements affirment que le développement durable fait partie intégrante de leur processus de placement, ils disent en fait que leurs recherches tiennent compte des facteurs ESG qui influencent fortement le risque et le rendement du placement, en plus des facteurs financiers traditionnels, lorsqu’ils prennent des décisions de placement. En général, l’intégration des facteurs ESG dans le processus de recherche est un moyen pour les investisseurs de compléter l’analyse financière traditionnelle. Ici, ce qui compte c’est d’évaluer dans quelle mesure une entreprise reconnaît les risques qui découlent de ses activités et sa capacité à bien les gérer.
3. Placements thématiques
Cette catégorie se situe en plein centre de l’axe de l’investissement durable. Un fonds de ce groupe pourrait autant pencher vers le profit que vers des valeurs éthiques. Une analyse plus poussée s’impose donc. Vous devrez regarder sous le capot, examiner les objectifs du fonds et vous assurer que les intérêts du gestionnaire correspondent aux vôtres.
L’investissement thématique consiste à investir dans des secteurs, des industries ou des sociétés qui devraient profiter des tendances macroéconomiques ou structurelles ESG à long terme. Choisir un placement dans une optique d’investissement durable ne signifie pas nécessairement que vous vous consacrez à améliorer le sort de la planète. Ce choix peut simplement révéler que vous avez constaté dans quelle direction le vent souffle (littéralement, dans le cas de l’énergie renouvelable) et reconnaissez le potentiel de placement à long terme que recèlent certains secteurs ou thèmes.
4. Intendance
Cette catégorie est unique, car elle repose sur la mobilisation. Elle s’intéresse à l’utilisation des droits et de l’influence des investisseurs pour protéger et accroître la valeur globale à long terme pour les clients. Il peut s’agir de voter en faveur des résolutions de la direction ou des actionnaires conformément à certains enjeux liés aux facteurs ESG (votes de procuration) ou d’interagir avec la direction d’une entreprise par le biais d’assemblées ou de dialogues, habituellement pour influencer positivement ses activités ou son comportement (engagement).
Par exemple, si vous remarquez qu’une société a établi des cibles de carboneutralité, vous pouvez communiquer avec elle pour vous assurer que les cibles sont bien divulguées et claires, et que l’entreprise surveille ces mesures.
5. Investissement d’impact
Cette dernière catégorie est sans doute la plus intéressante pour les investisseurs qui considèrent le placement comme un mécanisme utile pour améliorer le monde. Comme son nom l’indique, il comprend des fonds qui cherchent à produire un impact social ou environnemental positif et mesurable, ainsi qu’un rendement financier. Il peut s’agir, par exemple, de sociétés de logements sociaux ou d’entreprises qui s’efforcent de créer des emplois pour les anciens détenus. Il peut également s’agir de placements dans des sociétés qui ont une cible de réduction des émissions spécifique, conformément à l’objectif de placement.
Cette gamme de placement se subdivise davantage, car les fonds peuvent avoir des critères de déontologie et de rendement différents selon l’impact qu’ils visent. C’est à vous de décider dans quelle mesure vous désirez que votre investissement d’impact ait une portée philanthropique.
Voilà qui brosse un portrait simplifié d’un segment plutôt complexe. Tous les fonds ne s’inscriront pas parfaitement dans une même catégorie. Un fonds qui sélectionne les chefs de file peut également intégrer des facteurs ESG. Espérons toutefois que cet article saura constituer un point de départ pour votre exploration du monde de l’investissement durable.